Il est édifiant de contempler saint Joseph méditant la page où le jeune Isaac interroge son père Abraham : « Où est l’agneau pour l’holocauste ? » (Gn 22,7) Saint Joseph lisait en ces versets quelque chose de sa relation avec Jésus.
« Dieu pourvoira l’agneau pour l’holocauste mon fils. » (Gn 22,8) Par ces mots, Abraham assure Isaac qu’il peut compter sur Dieu ; il dit aussi sa confiance que Dieu est au cœur de leur relation de filiation. En hébreu, ce verset peut être compris comme un vocatif : « je te dis à toi, mon fils, que Dieu pourvoira », ou comme une apposition : « l’agneau pour l’holocauste est mon fils ». Le vocatif exprime l’espérance d’Abraham, elle consiste à croire que l’agneau sera donné par Dieu — si bien que l’agneau du sacrifice n’est pas le fils unique. L’apposition témoigne de l’obéissance d’Abraham, reconnaissant en son fils l’offrande destinée à Dieu — et acceptant de s’en séparer. Les deux lectures cohabitent dans la lettre du texte.
Ainsi, saint Joseph apprend des dispositions intérieures d’Abraham et les porte à leur perfection. L’espérance de saint Joseph est la plus extrême qu’un cœur de père puisse éprouver : « je te dis à toi, mon fils, que Dieu a pourvu à l’agneau ». Joseph déclare qu’il voit en Jésus l’accomplissement de son espérance du Messie. Dieu a donné l’Agneau. Saint Joseph manifeste aussi l’extrême de l’obéissance. Connaissant l’identité de son fils, il enseigne à Jésus : « tu es l’agneau pour l’holocauste », c’est-à-dire qu’il éduque son fils à la Croix. Saint Joseph renonce à garder son fils pour lui-même et enseigne à Jésus à ne pas garder sa vie pour lui-même.
C’est en s’effaçant qu’on devient père. C’est en se livrant qu’on devient fils.