Il est difficile de ne pas constater une recrudescence de livres et productions cinématographiques cherchant à réinterpréter le personnage de Jésus de Nazareth sur un horizon étranger aux évangiles. Ce phénomène n’est pas nouveau ; nous assistons simplement à une intensification de la campagne de désinformation concernant le divin Fondateur du christianisme. C’est pour répondre à ce défi que nous avions décidé de procéder à une lecture critique de l’ouvrage de Nicolas Notovitch : La vie inconnue de Jésus-Christ en Inde et au Tibet , réédité en 2004 aux éditions Pardès, l’original datant de 1894. Quelle ne fut pas notre surprise de découvrir une introduction historique, signée Christian Bouchet 1 , qui démonte point par point les thèses de N. Notovitch, prouvant de façon magistrale que l’ensemble du récit est totalement dépourvu de base historique. Nous nous contenterons donc de présenter une synthèse de l’ouvrage de N. Notovitch et de la critique de Ch. Bouchet.
Nicolas Notovitch
Commençons par présenter rapidement l’auteur. Né en 1858 dans une famille juive de Crimée, N. Notovitch se convertit à l’orthodoxie comme beaucoup de ses coreligionnaires de l’époque désireux de faire carrière. Il devint à la fois journaliste et agent d’influence de son pays, ce qui lui permit d’établir des relations suivies avec la France. Il obtint même la Légion d’honneur en remerciements pour les collections d’objets indiens et persans dont il avait enrichi le musée du Trocadéro. Car N. Notovitch entretenait également des relations suivies avec les pays d’Asie centrale, en particulier l’Inde du Nord où il effectua de nombreux voyages. Lors d’un de ces périples, il se serait rendu dans la partie indienne du Tibet, plus précisément au monastère de Hémis près de la ville de Leh, capitale du Ladakh, où seraient conservés des manuscrits faisant état de la vie de Jésus Christ en Inde et dans l’Himalaya, ainsi que des exposés de sa doctrine. Avec l’aide de son interprète, Notovitch aurait donc noté soigneusement les chroniques rédigées par des historiens brahmines et bouddhistes de l’Inde et du Népal. Revenu en Europe, il se serait vu refuser la publication de ses découvertes par le métropolitain de Kiev ; un prélat romain lui aurait offert de l’argent pour le dissuader de le faire ; et le cardinal Rotelli de Paris se serait également opposé à l’impression de son ouvrage, sous prétexte qu’il aurait servi d’argument aux courants athéistes. Monsieur Renan, plus avisé, aurait proposé de faire un rapport des notes de N. Notovich à l’Académie, mais l’auteur déclina la proposition, pressentant que la gloire de la publication et des commentaires reviendrait à l’illustre auteur de La vie de Jésus. C’est ainsi qu’il finit par publier lui-même le résultat de son enquête, commentée et pourvue d’une conclusion et d’une introduction dont nous tirons les précédentes informations. Lorsqu’on se souvient que Loisy appelait Renan « le premier maître des modernistes français », il est facile de situer N. Notovich dans les grands débats de la fin du XIXe siècle.
Notes :
- Christian Bouchet est docteur en ethnologie, journaliste et écrivain, spécialiste des formes marginales de la spiritualité contemporaine et des nouveaux mouvements religieux. [retour]