Famille de Saint Joseph

Caricature des sacrements

par | 31 décembre 2004

« La portée symbolique des sacrements transcende leur sens religieux. Chacun représente une étape dans le cheminement spirituel d’un individu en ce qu’il est une façon d’inviter le divin à pénétrer l’âme du fidèle. Chacun des sacrements fournit l’occasion d’accomplir une tâche symbolique, laquelle permet d’acquérir une plus grande maturité du point de vue de l’esprit et de la guérison. Les sacrements sont des gestes que nous posons, en plus d’être des rituels qui sont célébrés à notre intention. Ils représentent les pouvoirs que nous sommes habilités à accorder à autrui et que nous pouvons recevoir d’autrui. Réfléchissez par exemple au sacrement du baptême, par lequel une famille accepte d’assumer la responsabilité du bien-être physique et spirituel de l’enfant que ses membres ont mis au monde. Le défi qui nous est lancé en tant qu’adulte ayant atteint la maturité spirituelle est d’accepter de manière symbolique la famille dans laquelle nous sommes nés, et ce avec gratitude. »

Caroline Myss, Anatomie de l’esprit

L’ouvrage de Caroline Myss est un modèle de syncrétisme, tel que le conçoit la littérature du Nouvel Age. Aussi ne pouvait-il être qu’un best seller. Notre auteur fait habilement converger les principaux thèmes à succès du moment dans ce qu’elle nomme: «l’énergétique des maladies». Il faut savoir que C. Myss est une «intuitive médicale» – entendez un médium qui utilise son pouvoir de voyance pour relever les déséquilibres énergétiques dans les corps subtils de ses patients, et par là diagnostiquer leur maladie. Sa méthode vise à réaliser la santé intégrale – physique, psychique et spirituelle – par l’harmonisation de la circulation des énergies, obtenue grâce à une meilleure connaissance du rôle de chacun des chakras. Rien de neuf jusque là. Mais poussant plus loin sa recherche, notre auteur en est venue à la conviction que le message transmis par la tradition hindoue dans sa doctrine des chakras, est identique à l’enseignement de l’Eglise chrétienne sur les sept sacrements; on retrouverait également la même doctrine dans la Kabbale juive sous le symbole des sept niveaux de l’Arbre séfirotique. L’islam échappe de justesse à la réquisition, notre auteur estimant qu’elle ne connaît pas suffisamment cette tradition pour l’intégrer dans son tableau synoptique. Dommage qu’elle n’ait pas eu la même lucidité quant à son ignorance du christianisme, car la réinterprétation qu’elle en donne à la lumière de ses clés de lecture naturalistes, est franchement caricaturale! Pour notre auteur, les sacrements ne sont que des gestes symboliques que le rituel fait entrer dans la sphère du «sacré». Aucune allusion à une action divine transcendante et pour cause: le divin du Nouvel Age est immanent à la nature. L’initiative et l’accomplissement de la démarche sacramentelle reposeraient exclusivement sur l’homme, qui exprimerait dans ces rites une prise de conscience, correspondant au franchissement d’une étape significative sur le chemin de l’auto-divinisation. Pour le dire autrement: en posant un geste sacramentel, l’homme manifesterait qu’il a atteint un degré supérieur de conscience et peut dès lors accéder à un niveau plus subtil du divin en lui.

Dans le texte cité, le baptême se réduit à une reconnaissance et un accueil symboliques de l’enfant par la famille qui en accepte la responsabilité. Comme elle se situe dans une perspective de guérison intérieure, C. Myss souligne à juste titre l’importance de notre réconciliation personnelle avec nos origines, de la recomposition de notre réseau familial. Mais pour nous chrétiens, le baptême est infiniment plus qu’un psycho-drame symbolique. Tout sacrement est un signe efficace de la grâce, qui réalise ce qu’il figure par l’action conjointe du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. Le baptême est ensevelissement dans la mort du Christ, qui a voulu assumer cette ultime conséquence du péché, afin de nous rendre participants de sa résurrection, et nous introduire dans sa vie filiale par le don de l’Esprit. Quant à la dimension «sociale», elle réside dans l’incorporation dans la «famille de Dieu» (Ep 2, 19) qui est l’Eglise. Il est hélas trop clair que Caroline Myss ignore tout de la nouvelle naissance «de l’eau et de l’Esprit» (Jn 3, 5) par laquelle nous sommes devenus «enfants de Dieu» (Jn 1, 12-13). Prisonnière de ses a priori naturalistes, elle méconnaît le cœur du Mystère révélé et ne peut donner de la doctrine chrétienne qu’une vision édulcorée, sans transcendance, vidée de la grâce, n’ayant dès lors plus aucune valeur salvifique. Le christianisme passé sous les fourches caudines des axiomes du Nouvel Age, n’a plus rien à voir avec la Bonne Nouvelle proclamée par Jésus-Christ, Fils de Dieu Sauveur.

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