Caroline Myss, Anatomie de lโesprit
Lโouvrage de Caroline Myss est un modรจle de syncrรฉtisme, tel que le conรงoit la littรฉrature du Nouvel Age. Aussi ne pouvait-il รชtre quโun best seller. Notre auteur fait habilement converger les principaux thรจmes ร succรจs du moment dans ce quโelle nomme: ยซlโรฉnergรฉtique des maladiesยป. Il faut savoir que C. Myss est une ยซintuitive mรฉdicaleยป – entendez un mรฉdium qui utilise son pouvoir de voyance pour relever les dรฉsรฉquilibres รฉnergรฉtiques dans les corps subtils de ses patients, et par lร diagnostiquer leur maladie. Sa mรฉthode vise ร rรฉaliser la santรฉ intรฉgrale – physique, psychique et spirituelle – par lโharmonisation de la circulation des รฉnergies, obtenue grรขce ร une meilleure connaissance du rรดle de chacun des chakras. Rien de neuf jusque lร . Mais poussant plus loin sa recherche, notre auteur en est venue ร la conviction que le message transmis par la tradition hindoue dans sa doctrine des chakras, est identique ร lโenseignement de lโEglise chrรฉtienne sur les sept sacrements; on retrouverait รฉgalement la mรชme doctrine dans la Kabbale juive sous le symbole des sept niveaux de lโArbre sรฉfirotique. Lโislam รฉchappe de justesse ร la rรฉquisition, notre auteur estimant quโelle ne connaรฎt pas suffisamment cette tradition pour lโintรฉgrer dans son tableau synoptique. Dommage quโelle nโait pas eu la mรชme luciditรฉ quant ร son ignorance du christianisme, car la rรฉinterprรฉtation quโelle en donne ร la lumiรจre de ses clรฉs de lecture naturalistes, est franchement caricaturale! Pour notre auteur, les sacrements ne sont que des gestes symboliques que le rituel fait entrer dans la sphรจre du ยซsacrรฉยป. Aucune allusion ร une action divine transcendante et pour cause: le divin du Nouvel Age est immanent ร la nature. Lโinitiative et lโaccomplissement de la dรฉmarche sacramentelle reposeraient exclusivement sur lโhomme, qui exprimerait dans ces rites une prise de conscience, correspondant au franchissement dโune รฉtape significative sur le chemin de lโauto-divinisation. Pour le dire autrement: en posant un geste sacramentel, lโhomme manifesterait quโil a atteint un degrรฉ supรฉrieur de conscience et peut dรจs lors accรฉder ร un niveau plus subtil du divin en lui.
Dans le texte citรฉ, le baptรชme se rรฉduit ร une reconnaissance et un accueil symboliques de lโenfant par la famille qui en accepte la responsabilitรฉ. Comme elle se situe dans une perspective de guรฉrison intรฉrieure, C. Myss souligne ร juste titre lโimportance de notre rรฉconciliation personnelle avec nos origines, de la recomposition de notre rรฉseau familial. Mais pour nous chrรฉtiens, le baptรชme est infiniment plus quโun psycho-drame symbolique. Tout sacrement est un signe efficace de la grรขce, qui rรฉalise ce quโil figure par lโaction conjointe du Pรจre, du Fils et de lโEsprit Saint. Le baptรชme est ensevelissement dans la mort du Christ, qui a voulu assumer cette ultime consรฉquence du pรฉchรฉ, afin de nous rendre participants de sa rรฉsurrection, et nous introduire dans sa vie filiale par le don de lโEsprit. Quant ร la dimension ยซsocialeยป, elle rรฉside dans lโincorporation dans la ยซfamille de Dieuยป (Ep 2, 19) qui est lโEglise. Il est hรฉlas trop clair que Caroline Myss ignore tout de la nouvelle naissance ยซde lโeau et de lโEspritยป (Jn 3, 5) par laquelle nous sommes devenus ยซenfants de Dieuยป (Jn 1, 12-13). Prisonniรจre de ses a priori naturalistes, elle mรฉconnaรฎt le cลur du Mystรจre rรฉvรฉlรฉ et ne peut donner de la doctrine chrรฉtienne quโune vision รฉdulcorรฉe, sans transcendance, vidรฉe de la grรขce, nโayant dรจs lors plus aucune valeur salvifique. Le christianisme passรฉ sous les fourches caudines des axiomes du Nouvel Age, nโa plus rien ร voir avec la Bonne Nouvelle proclamรฉe par Jรฉsus-Christ, Fils de Dieu Sauveur.