cosmo-tellurisme

Verrouillé
J-Ch Salin

cosmo-tellurisme

Message par J-Ch Salin »

C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu votre livre « 100 questions sur les nouvelles religiosités ».
Cependant, permettez-moi de faire quelques remarques :
1) vous parlez de nombreuses fois d’ « analogie » ; ne serait-il pas plus juste de parler de « comparaison » ou de « métaphores » ?
2) à propos des « ondes cosmo-telluriques » (page 141) :
Je ne connais que deux champs, de portée quasi-infinie, qui donnent de l’énergie :
- le champ de gravitation, qui nous permet de garder les pieds sur terre et fait que celle-ci tourne autour du soleil ;
- le champ électro-magnétique, avec ses deux composantes : électrique et magnétique.
En ce qui concerne la terre, le champ magnétique est quasiment constant : c’est lui qui dévie la boussole vers le nord. Les champs électriques, qui peuvent être importants, sont transitoires et localisés : ils existent principalement au moment des orages (éclairs et foudre). Les « ondes telluriques » semblent être uniquement le champ magnétique terrestre. Que vient faire le « cosmo » là-dedans ? La terre est protégée des vents solaires et cosmiques par sa magnétosphère qui dévie les particules chargées vers les pôles magnétiques, provoquant les aurores boréales. Donc l’influence de champs cosmiques à l’intérieur de la terre est nulle. Nous savons que le « vent cosmique » a une influence sur la formation des nuages bas mais c’est tout : la terre ne subit pas d’influence, seulement l’atmosphère. D’ailleurs, l’exemple que vous donnez pages 142-143 semble montrer que le « géobiologue » est un charlatan.
À ce propos, j’ai cherché qui était Hartmann et la géobiologie :
- pour É. Hartmann, je n’ai trouvé qu’un pseudo-philosophe allemand du XIX° siècle que l’on peut considérer comme prédécesseur de Freud. Il existe, en magnétohydrodynamique, des « écoulements de Hartmann », mais ceci n’a rien à voir avec le Hartmann cité ;
- pour ce qui est de la géobiologie, elle est surtout connue par les travaux de Deflandre (1897-1973) qui montre comment des micro-organismes peuvent participer à la formation de roches (en particulier le pétrole et le charbon), mais je ne pense pas que c’est dans ce sens que vous en parlez, mais d’une manière plus ésotérique…
Enfin, en ce qui concerne les « magnétiseurs », il est certain que des personnes ont un ascendant psychique sur d’autres personnes ; mais les « passes magnétiques » n’ont de magnétisme que le nom et c’est à mettre sur le compte du charlatanisme.

Encore merci pour votre livre !

Avec mon filial respect,

J-Ch Salin

P. Joseph-Marie

Re: cosmo-tellurisme

Message par P. Joseph-Marie »

Pour la première remarque, il me faudrait vérifier coup par coup, car les termes cités ne sont pas équivalents. Mais il se peut fort bien – il est même probable – que l’ouvrage contienne des imprécisions terminologiques : il s’agit de la transcription de dialogues radiophoniques et de réponses données sur Internet.
Vous aurez remarqué que je mets également le terme « cosmo-tellurisme » entre guillemets, comme n’étant pas scientifique et en attente d’explication, voire de justification. Vous soulignez très justement la limite de ce genre de verbiage : la nature des ondes cosmiques dont il est question n’est pas précisée ; comme elles ne font pas partie du domaine d’étude de la physique, elles ne peuvent être que de l’ordre occulte. Dès lors, contrairement à ce que prétendent les géobiologues, les moyens de détection éventuels ne peuvent être qu’occultes eux aussi.
J’ai pu vérifier par moi-même que la baguette particulière qu’ils proposent, et qui pourrait soi-disant être utilisée avec succès par n’importe qui, fonctionne en fait comme support de la médiumnité de celui qui s’en sert. Nous sommes donc bien à nouveau dans une pratique occulte sous couvert d’un langage pseudo-scientifique. La suite du témoignage en pp. 142-143 le prouvent effectivement comme vous le soulignez.
Lorsque j’ai entendu parler pour la première fois de « géobiologie », j’ai été tout aussi égaré que vous dans mes recherches ! Je ne m’attendais pas du tout au discours auquel je fais allusion dans l’ouvrage, mais plutôt à une étude sur l’influence de la flore et de la faune sur les strates géologiques. En fait le terme se réfère à une conception animiste de la Terre, très en vogue aujourd’hui (Nouvel Age oblige) : vous n’êtes pas sans savoir que notre bonne Planète a enfin retrouvé son nom originel (donné par Hésiode dans sa cosmogonie, 4 siècles avant notre ère) et s’appelle à nouveau la déesse Gaïa ? Un géobiologue est tout fier de citer dans son ouvrage Basilius Valentinius qui écrivait au Moyen Age que la Terre « recèle un Esprit qui est sa vie et son âme ». En fait les fameux courants Harmann représenteraient un peu les méridiens (de l’acupuncture) de notre Planète. La référence à la géomancie chinoise est d’ailleurs explicite. Actuellement cette géomancie fait d’ailleurs fureur sous le nom de Feng-Shui. Mais comme il faut néanmoins garder un « air du terroir », nos géobiologues se réfèrent également à la tradition celte (autre best seller du Nouvel Age depuis quelques années), se référant inévitablement aux alignements du Ménec à Carnac et autres dolmens et cromlechs. Les menhirs feraient le lien entre terre - courants « telluriques » - et ciel - lumière solaire, et de là sans doute courant « cosmiques », mais il y a belle lurette que nous avons quitté le domaine scientifique, comme vous avez pu vous en rendre compte par ces quelques précisions.
Il s’agit en fait d’une vulgarisation exotérique d’une vieille doctrine ésotérique selon laquelle l’homme serait à la jonction de deux influences énergétiques : « cosmique » et « tellurique », qu’il doit intégrer harmonieusement en lui-même.
C’est donc plutôt vers les conceptions orientales de la double polarité de l’Energie universelle (Ying-Yang) qu’il faut se tourner pour essayer de comprendre ce qui se dit sous ce discours pseudo-scientifique.
Un autre auteur ira plus loin encore et comparera ces ondes « cosmiques » aux influences des astres dont parle l’astrologie…
La preuve est ainsi faite que nous avons définitivement quitté le terrain de la science, et que les mots ne veulent plus dire grand-chose dans ce genre de discours.
Ceci constitue d’ailleurs un des pièges les plus redoutables du Nouvel Age, qui sème la confusion et pratique la « captatio benevolentiae » en se permettant de changer le contenu sémantique de concepts scientifiques pour se les approprier.

Verrouillé