Les pratiques magiques visent à utiliser les énergies immanentes à notre monde pour influer sur l’entourage, qu’il s’agisse de la nature, des événements ou des personnes. Ces pratiques ont un caractère privé, individuel, secret. Elles supposent que le magicien ait reçu l’initiation par laquelle il a été mis en contact avec l’esprit du monde astral qui lui donnera le pouvoir d’agir sur ce plan occulte. Tous les mages reconnaissent que leur action n’aurait aucune efficacité sans la collaboration active de ces entités. Il n’y a donc rien de sur-naturel dans cette démarche ; le mage ne croit d’ailleurs pas à l’existence d’un plan surnaturel : pour lui la nature et les énergies qui lui sont immanentes sont divines. La « théurgie » ou haute magie prétend même restituer l’homme à sa condition primordiale, dans laquelle il était supposé disposer de l’omniscience et omnipotence divines. Le mage réalise cette « régénération » en s’immergeant dans les énergies occultes de ce monde créé, afin de s’en imprégner et d’en disposer à sa guise – toujours avec la complicité des esprits gouvernants les différents niveaux de ces énergies. Les rituels magiques sont performants par eux-mêmes, c’est-à-dire par le simple fait de les accomplir selon les règles prescrites par le grimoire (manuel de pratiques magiques). En fait, les paroles, signes, gestes, ustensiles sont autant de manières d’invoquer l’esprit (ou les esprits) qui va (vont) donner au rituel sa force opératoire.
Les sept sacrements sont les sept canaux par lesquels le Dieu transcendant, Créateur et Sauveur, veut déverser sa grâce salvifique sur les hommes, et par eux dans le monde. L’initiative cette fois vient d’en-haut. La force agissante dans les sacrements n’est pas une énergie naturelle, immanente à ce monde créé, mais la grâce divine incréée, c’est-à-dire l’Esprit Saint lui-même. Certes les rituels sacramentaux sont accomplis par des hommes, mais ceux-ci ont été ordonnés à cet effet et ont reçu mandat pour le faire ; de plus leur action n’est efficace que dans la mesure où ils ont l’intention de faire ce que veut faire l’Eglise, c’est-à-dire ce que le Christ lui-même veut réaliser personnellement dans son Eglise. Pour le dire autrement : le prêtre agit « in personna Christi capitis » : il n’agit pas en son nom propre, mais au nom du Christ, tête de l’Eglise. La grâce divine n’est donc pas « magique » au sens où le résultat escompté n’est pas obtenu par le seul fait de poser l’acte convenu : il faut que le ministre soit dans les dispositions de foi exigées par son ministère. Quant à « l’efficacité » des sacrements, c’est-à-dire le fruit qu’ils portent dans la vie des fidèles qui reçoivent le sacrement, elle dépend de leur disposition à accueillir la grâce. En latin nous disons que nous recevons la grâce « ad modum recipientis » : à la mesure de notre capacité de la recevoir. Enfin et peut-être surtout, le but du sacrement est d’établir le fidèle en relation personnelle et vitale avec son Seigneur, et pas d’opérer quelques transformations dans son âme ou son corps. La présence agissante de l’Esprit Saint peut certes induire de telles transformations, mais elles ne sont pas la visée première du sacrement, dont la finalité est avant tout salvifique : il s’agit d’accueillir la grâce de filiation divine et de nous laisser transformer en celui qui vient à nous dans les sacrements. Cette transformation est une véritable recréation, Dieu élevant notre nature jusqu’à lui afin de nous permettre de communier à sa propre vie dans l’amour.
Ainsi donc, Dieu n’obéit pas à un rituel efficace qui le contraindrait de nous exaucer ; mais il se rend présent par pure grâce au rendez-vous qu’il nous a lui-même fixé pour nous combler des biens dont il sait que nous avons besoin. Ceci dit, nous reconnaissons qu’il peut y avoir une manière « magique » de vivre les sacrements, mais il s’agit alors d’une déviance humaine, qui ne correspond pas à l’intentionnalité divine, et dont le croyant est invité à se corriger par une conversion sincère à la Personne du Christ, qui vient à lui dans les Saints Mystères.