Issu du punk dans le début des années 80 (alternative punk), le mouvement gothique est un mouvement under-ground préconisant un style musical, une esthétique vestimentaire et un état d’esprit particuliers. Ils préconisent des expéditions dans des lieux ténébreux présentant une atmosphère morbide, comme les cimetières ou les catacombes, où ils aiment passer la nuit. Ils sont fascinés par l’inquiétant, l’étrange, le fantastique, le ténébreux.
La « culture » gothique s’inspire principalement de deux périodes : le Moyen-Âge et surtout le romantisme, dont il privilégie et accentue les aspects tristes, lourds, voire lugubres. Ils préfèrent le romantisme noir, spécialement la tradition britannique du milieu du 19ème s. : Dracula de Bram Stoker, Frankenstein de Mary Shelley, Vampire de J. Polidori, Carmilla de Sheridan Lefanu ; ou encore les romans sombres d’Anne Ratcliffe. Au niveau musical, des groupes comme « The Cure » ou « Sister of Mercy » sont considérés comme fondateurs de « la cathédrale gothique ». Le flambeau est de nos jours repris par d’autres groupes aux noms significatifs : « Tristania », « Paradise lost », « Tiamat », « Christian Death ».
Les gothiques affectionnent les atmosphères mystérieuses et inquiétantes, qui suscitent la peur, l’angoisse. Les musiques aux rythmes lourds portent des chants plaintifs, dont les textes troublants tournent autour de la mort. L’amour lui-même est célébré dans son aspect pathétique de drame déchirant, débouchant sur l’issue fatale. La souffrance, qui arrache des cris voire des hurlements de désespoir, est au cœur des célébrations gothiques.
Autant dire que le pessimisme, la mélancolie, l’affliction sont de mise ; et ce goût pour le macabre transparaît jusque dans l’esthétique. Le noir prédomine et est en fait l’unique couleur ; des cheveux teints jusqu’à la dentelle : tout est noir. Seuls le violet, le pourpre ou le mauve peuvent éventuellement trouver grâce. Les matières préférées mais non exclusives, sont le cuir, le latex ou la soie. L’apparence du gothique est froide, sévère ; en même temps elle est sophistiquée ; son habillement est parfois même recherché, élaboré. Le maquillage – très marqué – souligne des lèvres noires sur un fond de visage blanchâtre évoquant un mort-vivant. Pendentifs et bagues complètent la panoplie mortuaire : croix, corbeaux (signe de solitude), têtes de mort, ossements ou squelette.
En principe, cet accoutrement se veut l’expression des sentiments profonds du gothique ; mais on peut se demander s’il ne s’agit pas plutôt d’un effet de mode et d’une dynamique de groupe, qui risquent d’induire chez des personnes fragiles ou malléables, des sentiments morbides pouvant conduire à de véritables dépressions. Loin de les aider à contenir leurs angoisses, cette dramatisation de la souffrance, et cette théâtralisation des sentiments morbides, risquent plutôt de réveiller des peurs enfouies et de les exacerber jusqu’à des niveaux pathologiques. Les réunions dans un décor composé de pierres tombales, de croix, de chandeliers, de drapés funéraires et de cercueils, dont certains serviront de litière, tout cela dans une atmosphère sombre, sinistre, morbide, n’arrange certainement pas les psychismes délicats.
Il y a indiscutablement un fort aspect contestataire, anticonformiste dans le mouvement gothique – que celui-ci reconnaît d’ailleurs parfaitement. Mais prendre plaisir à ce qui est mortifère est pour le moins malsain ; et nous avons hélas déjà pu constater comment ce genre de « divertissement » peut conduire à des débordements intolérables.