effort d'imagination

Verrouillé
Julien

effort d'imagination

Message par Julien »

dans le bulletin paroissial d'hier, le curé du village voisin a écrit tout un éditorial qui m'a beaucoup déplu. Le thème est la fraternité chrétienne, mais le terme chrétien apparaît 2 fois: la première pour désigner de nouvelles "communautés chrétiennes", la seconde pour parler des efforts oecuméniques envers les autres chrétiens. C'est tout.
Le coeur du problème soulevé est que le monde rural a changé. Et tout ressemble à un cours de sociologie... comme si cela était nouveau. Le thème du déracinement existait déjà au début du XXe siècle! Enfin, c'est comme si cette qualification de nouveau permettait de ne pas tenir compte du passé. Toute tradition est discréditée car c'est un phénomène nouveau! Il est donc proposé d'avoir des "initiatives", de se réunir et de "partager" dans des lieux "d'échange"... mais les mots "communion", "communion des saints", "Eucharistie" n'apparaissent jamais.
C'est comme si, l'important n'était plus Dieu et les sacrements, source de l'union des chrétiens, mais l'union elle-même. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre, mais un glissement me semble avoir été fait. Le but n'est plus Dieu mais la relation que les hommes ont entre eux. Pour moi, la joie de vivre en paroisse nait de Dieu, et non l'inverse.
La semaine dernière, le curé a lu un texte de Jean Paul II qui mettait en garde contre la vision d'un Dieu "énergie cosmique". Il l'a vite lu (et je n'ai réussi à en avoir les références), et il donnait l'impression qu'il trouvait cette conception fort bizarre. Et pourtant, le bulletin paroissial peut tout à fait être lu selon cette vision chère au New Age. Si Dieu est une énergie cosmique, chacun l'a a l'intérieur de lui, et on n'a plus besoin de parler des sacrements: ce qui compte c'est l'échange entre chaque détenteur de l'énergie.
Je vous assure que, personnellement, même si je suis jeune, je pense avoir les pieds sur terre et ce n'est pas ce discours qui me fera vaciller. Je ne crains pas non plus pour mes frères. J'en parlais hier avec une vieille dame et elle m'a dit qu'il ne fallait pas en vouloir au curé, qu'il était très faible psychologiquement, et qu'il était sous la coupe d'une équipe de catéchistes particulièrement progressistes. En général, les progressistes me font beaucoup rire, parce qu'il suffit de regarder leurs oeuvres pour voir que l'arbre donne de forts mauvais fruits.
Mais que dit le bulletin paroissial de cette fois-ci? Il mélange en une phrase la nostalgie et la mémoire; comme le phénomène du déracinement et de la déchristianisation est nouveau (je précise: il y a 30 ans, dans la paroisse sic), seule compte l'imagination pour inventer de nouvelles formes de relations. Exit l'Eucharistie. L'imagination suppose la tabula rasa, donc les mauvais fruits ne sont pas considérés. Si l'église est vide et les enfants déchristianisés cela touche la société et c'est la faute à pas de chance. Bref, pas besoin de changer quoique ce soit. Bonne méthode pour rentrer dans le mur.
J'ai écrit un commentaire du bulletin -ce qui correspond un peu aux initiatives demandées- mais ma mère pense que le curé n'est pas capable de comprendre. Pour revenir sur mon impression de charrue placée devant les boeufs entre Dieu et le "partage", j'aimerais savoir si c'est moi qui ai un problème de compréhension ou si c'est justifié. Si vous voulez, je peux vous recopier l'intégralité de l'éditorial.
Merci d'avoir lu mon message malgré sa longueur.

Julien

suite d'effort d'imagination

Message par Julien »

Voici l'édito du bulletin paroissial reproduisant l'"appel du carrefour de l'Eglise en rural" (CER) (je précise car ça pourrait presque sembler venir de la mairie):
Construire la fraternité en rural
Le monde rural change. Migrations de populations, diversifications économiques, recompositions territoriales: toutes ces évolutions engendrent de nouveaux dynamismes dans la vie associative, économique, sociale & politique. Mais il arrive qu'elles fassent surgir des tensions car les aspirations & intérêts des différents habitants ne convergent pas toujours. Elles font aussi émerger des sources d'inégalités dans l'accès à l'habitat, à l'emploi, au foncier.
Ces bouleversements ont cassé les solidarités traditionnelles & distendu les liens sociaux qui existaient auparavant en milieu rural. On ne peut plus attendre que les années passent pour que chacun se sente intégré (..)
Regretter les temps anciens n'est pas la solution. En face de ces réalités rurales inédites, n'est-ce pas plutôt l'effort d'imagination qui doit primer? Nous voulons contribuer avec d'autres à penser & organiser des initiatives pour permettre une vie rurale hospitalière & fraternelle.
Voici nos propositions:
*Développer des communautés chrétiennes fraternelles qui donnent le goût du partage & de l'engagement pour habiter nos campagnes d'une autre manière.
*Participer à l'animation des lieux de rencontre & d'échanges qui permettent la compréhension des aspirations de chacun, osent le débat & ouvrent la possibilité de projets communs.
*Participer à la transformation des conditions de vie en rural en mettant en oeuvre de nouvelles solidarités pour offrir à chacun de vivre & travailler dignement en rural.
Avec tous ceux qui croient en l'idéal de fraternité dans les autres confessions religieuses, croyances philosophiques, nous sommes en chemin & comptons persévérer pour élaborer une fraternité renouvelée dans les territoires ruraux.
Je ne connais pas l'organisme CER, mais tel quel sur le bulletin paroissial, ça me semble bizarre. C'est comme si tout fonctionnait à l'envers. La solidarité, l'intégration, c'est très bien, mais j'ai l'impression que c'est le but premier. Pour moi ce ne sont que des conséquences du but premier qui est Dieu. Mais Il est escamoté, oublié. Ca ne m'étonne pas car tout fonctionne à l'envers dans cette paroisse.
Que pensez-vous, mon Père, de cette recherche de la "relation" entre personnes? Je vous assure que, pour moi, la baisse de fréquentation des sacrements ne peut que s'accentuer avec ça.

P. Joseph-Marie
Messages : 1327
Enregistré le : 5 sept. 2003

Re: effort d'imagination

Message par P. Joseph-Marie »

Julien a écrit :Pour revenir sur mon impression de charrue placée devant les boeufs entre Dieu et le "partage", j'aimerais savoir si c'est moi qui ai un problème de compréhension ou si c'est justifié.
Il y a deux extrêmes à éviter : la religion « privée », où les personnes participent individuellement aux sacrements, chacun pour soi, pour leur « sainteté privée » - ce qui est évidemment un non-sens, car nous recevons tout, de la foi aux sacrements, de l’Eglise, Corps du Christ, dans lequel nous ne faisons qu’un avec le Seigneur et entre nous.
Mais par réaction à cette première dérive, on peut effectivement tomber dans l’extrême inverse, et tellement insister sur la dimension communautaire au détriment de la relation personnelle au Christ, qu’on en oublie Celui qui fonde notre unité.
Heureusement entre ces deux dérives, il y a de l’espace pour naviguer ecclésialement !:wink:
Le texte que vous publiez n’est pas vraiment choquant. Certes il ne précise pas les moyens qui seront mis en œuvre pour créer cette nouvelle solidarité, mais il n’exclut pas non plus des rencontres de prière, des célébrations et autres activités cultuelles. Je crois qu’il nous faut chercher à avoir un a priori positif des propositions qui nous sont faites, de manière à pouvoir soutenir les efforts qui le méritent, et éventuellement essayer de les faire grandir de l’intérieur par des propositions judicieuses si cela s’avère nécessaire. N’oublions pas que depuis que Dieu s’est fait homme, le chemin de l’homme vers Dieu passe par l’Homme-Dieu, mais aussi par les autres hommes auxquels il a voulu s’identifier. « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ».

brunoS

effort d'imagination

Message par brunoS »

Si je puis me permettre, pour aussi répondre à Julien, le problème est surtout la présence de clivages entre soit-disant "progressistes" et soit-disant "conservateur".
Il faut que chacun accepte l'autre et laisse agir l'Esprit Saint, en se mettant au service de l'Eglise, et non l'inverse.
Un exemple frappant de ces clivages aparemment irréductible est le refus du Latin par les "progressistes". Je suis chantre à l'Eglise et certains curé, l'air inquiet, me demandent en quelle langue je vais chanter! alors que j'utilise presque toujours le Français! L'an dernier, je me suis fait reprendre devant l'assemblée, parce que nous chantions le SALVE REGINA pendant le temps pascal! Heureusement, dans cette paroisse, ces gens sont minoritaires et même si ça leur déplaît, ils nous laissent faire, ce qui nous permet de vivre des liturgies priantes en tous points conformes au Concile Vatican II. Ne ter décourage pas: les "progressistes" fermés sont en général des 68ards attardés de plus de 50 ans. Il faut attendre qu'ils partent patiemment et trouver d'autres jeunes pour faire évoluer les choses. Tu pourrais proposer des temps forts: Adoration, Vêpres (par exemple pendant l'Avent ou le Carême), chapelet avec quelques jeunes et moins jeunes. Pour ma part, 2 choses m'ont transformé et me donnent courage pour aujourd'hui, malgré les vents contraires (dans le genre de soit-disant catholiques qui critiquent tant notre bien-aimé Pape BENOIT XVI): les JMJ 1997 et Paray-le-Monial. Les JMJ m'ont fait connaître d'autres façon de prier (Polonais et Togolais, la foi chevillée au corps) et m'ont fait comprendre qu'il fallait revenir à la source: le Christ au centre et l'Eglise qui est vraiment notre mère et qu'il nous faut aimer. Se replonger dans les textes du Concile et le missel romain vaut mieux que toutes ces réunionites qui éloignent de la vérité.
Bon courage à toi Julien!

Julien

merci

Message par Julien »

c'est vrai que je ne regarde pas ce texte avec un fort a priori positif :oops:
Sans doute est-ce à cause des méthodes employées et des "fruits" pas très bons qui naissent de cela, par exemple chez les jeunes. Mon oncle est allé à Lourdes et il était vraiment enthousiasmé par tous ces jeunes qui découvraient la Ste Vierge et l'Eglise avec tant de joie. Il aurait bien aimé que ses enfants en fassent partie... malheureusement, ce n'est pas le cas. Et avec le caté reçu, je les comprends fort bien. Même la liturgie n'incite pas vraiment. Enfin, je vous remercie bien pour votre réponse.
Comme sur le calendrier, tous les temps de prière avec salut du saint sacrement ont disparu, et qu'il ne reste plus que les "réunions" de tel ou tel groupe pour discuter d'une nouvelle "dynamique", mon esprit aurait dû être plus attentif. Merci.

bruno S

effort d'imagination

Message par bruno S »

Cher Julien,
je pensais que mon témoignage positif t'aiderait à reprendre un peu plus espoir. C'est vrai qu'en milieu rural, on a moins "le choix" pour trouver une paroisse constructive ou l'on se sente bien...¨Pour les temps d'Adoration du Saint-Sacrement, à part à la fête du Corps et du Sang du Christ (appelée aussi "fête-Dieu") qui est marquée au calendrier, on peut privilegier des temps d'Adoration toute l'année, surtout en cette année de l'Eucharistie voulue par notre bon Pape Jean-Paul II. Mon curé en a organisé chaque jeudi du Carême, et une fois par mois au moins dans l'année. Même si nous étions 3 ou 4, nous avons prié avec ferveur, adorant le Christ 1h, le louant et chantant, ou le priant en silence en se laissant aimer par lui. Ce curé a aussi rétabli le sacrement du pardon^par des permanences hebdomadaires; même s'il n'a eu personne pendant 3 semaine, la 4è fois, plusieurs personnes sont venues se confesser et demander le pardon du Seigneur! Tu vois, il faut persévérer: cela n'a pas été facile pour ce prêtre, mais finalement, les gens sont contents alors qu'au départ ce n'était pas gagné. Quant à la liturgie, bien sûr, je suis sensibilisé à cette question en tant que chantre dans différents clochers. J'ai du me battre face aux erreurs liturgiques censées ramener des jeunes dans nos églises. Nul n'est propriétaire de la LITURGIE (voir à ce sujet le texte du Pape JEAN-PAUL II "MANE NOBISCUM DOMINE" et son commentaire publié par le cardinal ARINZE). Or les personnes don,t tu parles devraient sans doute faire acte d'humilité en se replongeant dans le missel romain, qui permet de belles liturgies: par exemple, tout ce qu'il nous a été donné de voir à Rome ces temps-ci, ou encore les JMJ conformes, ou la Communauté de l'Emmanuel, conformes au missel, et non pas la "liturgie" de tel prêtre ou telle équipe ou de x ou y. J'ai réussi à faire ce message dans mon coin ,mais il faut se battre tous les jours: j'ai été jusqu'au bureau de l'évêque te même de l'archev^que pour expliquer l'ecoeurement des jeunes "authentiques" sur le terrain! Je me sens encore maintenant plus près du siège apostolique que de l'Eglise de France...Courage, car si tu vas dans le bon sens, l'Esprit-Saint t'éclairera et le Seigneur t'aidera. Dans ton cas,il serait bon que tu puisse te retrouver en petite communauté type "renouveau" ou autre.
Courage, le Seigneur est avec ceux qui aiment son Eglise d'un coeur sincère!

Julien

réponse à Bruno S

Message par Julien »

Merci beaucoup Bruno S pour vos messages. Je viens de les découvrir à l'instant car ils n'étaient pas encore affichés au moment de ma dernière réponse.
Rassurez-vous, le choix d'une "paroisse constructive où l'on se sente bien" m'est beaucoup plus facile dans la grande ville où je fais mes études. :wink:
Ici, il y a même des messes tous les jours, des veillées etc.
Le problème qui me préoccupe touche davantage les autres paroissiens de ma paroisse. D'ailleurs, soit dit en passant, à moins d'arriver avec une chorale, vous ne parviendrez pas à faire chanter le Salve Regina ou le Regina Caeli, personne ne les connait plus aujourd'hui. Pour la liturgie, c'est aussi assez délicat. Je me souviens d'un dimanche où le curé avertit ses fidèles pour fléchir le genou au "et le Verbe s'est fait chair" du Credo. Le plus simple est désormais de ne plus réciter, ou chanter, ce symbole: le Gloire à Dieu est moins 'contraignant'. Et ce n'est pas une question de missel romain ou de textes du Concile. Vous rappeliez l'année de l'Eucharistie, déjà que le tabernacle se trouve dans une chapelle latérale, car au fond du choeur le bel orgue trône avec bien plus de magnificence, il n'est guère étonnant que ce sacrement soit délaissé des jeunes.
Vous écrivez que la génération 68 passera. Oui, sans doute, c'est visible à la ville. A la campagne, c'est moins net. C'est d'autant plus facile que le reste de la population, quand il a eu la chance d'éviter l'école privée du bourg, ne bénéficie pas d'une formation solide. C'est d'autant plus vrai pour l'instruction religieuse.
Le père Verlinde nous alerte sur ces forums des dangers qui guettent l'homme d'aujourd'hui. Et que vois-je dans ma paroisse? Exactement le contraire. Si les églises sont vides, c'est un phénomène nouveau, on n'y peut rien. Si les jeunes ne vont plus à la messe, c'est courant à notre époque... Vous enseignez quoi au caté? Ah, vous comprenez, on a changé la méthode: on ne part plus de Dieu, on part de l'enfant.. donc si l'enfant préfère jouer au ballon? Et bien il joue au ballon.
Et ma cousine qui ne va plus à la messe, ce qui découle entre autre de votre caté, vous en pensez quoi monsieur le curé? Et bien, d'abord ce n'est pas moi mais les catéchistes qui font le caté, et puis elle rencontrera bien quelqu'un sur sa route pour lui montrer la voie. Et le dimanche suivant, le même au micro: le bon pasteur laisse son troupeau pour aller chercher la brebis égarée...
Mon but n'est pas ici de casser du sucre sur une équipe paroissiale, c'est plutôt de souligner le problème. A mes yeux, le texte de "construire la fraternité en rural" est vague, flou... d'ailleurs à l'image de presque tous les bulletins paroissiaux de ce village. Contre le New Age et compagnie, Dieu dans l'Eucharistie est essentiel à l'homme. Alors que l'école est en crise, que la jeunesse recherche un roc sur lequel s'adosser, rien. A la place de l'imagination seule, j'aurais plutôt opté pour la mémoire car elle tient compte des leçons du passé.
Pour reprendre votre réponse, père Verlinde, loin de moi l'attachement à une religion exclusivement "privée"; seulement le terme "communion des saints", dans un bulletin paroissial, me semble préférable à "solidarités" ou "projets communs". Et pour reprendre la conclusion de l'idéal de fraternité, je ne me sens pas "en chemin" avec des "croyances philosophiques" telles que le bouddhisme ou l'antroposophie. Le texte me semble encore une fois trop ambigu.

Verrouillé