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Message par Invité »

Mon Père,
Quelle formulation employer pour avouer en confession à un prêtre sans doute peu au courant de tous ces problèmes psychologiques, un acte de masturbation , qui est une habitude d'enfance angoissée et qui revient malheureusement épisodiquement après plus de 20 ans de vie religieuse?
Est-ce toujours un péché mortel?
:oops:
une âme en plein désarroi

P. Joseph-Marie
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Enregistré le : 5 sept. 2003

Message par P. Joseph-Marie »

Je crois que le plus simple est de le formuler comme vous venez de le faire sur le mail.
L’auto-érotisme est sans doute le péché le plus humiliant à avouer, en partie en raison de la culpabilité diffuse autour de tout ce qui relève de la sexualité, mais aussi parce que nous pressentons bien qu’il s’agit d’un acte régressif – comme vous en êtes bien conscient d’ailleurs puisque vous le signalez vous-même.
L’adulte s’épanouit, trouve sa jouissance, dans la relation aux autres ; si tel n’est pas le cas – en raison le plus souvent de blessures relationnelles remontant à la petite enfance – il se replie sur lui-même et va rechercher une compensation dans une jouissance narcissique. Je crois que l’auto-érotisme est une forme d’ « implosion », par impuissance à s’ « éclater » dans des relations interpersonnelles épanouissantes.
Il y aurait donc à revisiter les relations fondatrices de votre personnalité (relation au père, la mère, la fratrie) pour essayer de découvrir où se situe le nœud qui vous empêche aujourd’hui encore, de vous épanouir pleinement dans votre vie relationnelle.
Au niveau spirituel, le péché est rupture d’alliance ; nous sommes créés « vers » Dieu, et par notre acte de foi, nous choisissons d’aller à lui par le chemin qui est le Christ Jésus. Ce qui implique une sortie de nous-même, une mort au vieil homme dont parle Saint Paul. La masturbation est tout au contraire un acte de replis sur soi, de recherche de volupté solitaire, qui est à l’opposé de cette sortie vers le Christ et vers les autres. Il y a donc péché puisqu’il y a rupture délibérée de l’alliance avec Jésus, scellée dans l’Esprit.
Mais sans pour autant « psychologiser » le péché, il est certain après ce que j’ai dis en première partie, qu’il y a des circonstances atténuantes au sens où l’acte se pose sur le « terrain » d’une blessure d’enfance. Il y a donc une sorte d’aliénation psychologique qui vous empêche de faire pleinement ce que vous voudriez. Certes, la volonté devrait en principe pouvoir dominer la tentation – et c’est la part de « faute » - mais la faiblesse humaine et l’habitude – terrible ennemie ! – vous entraînent là où vous ne voudriez pas tomber.
Le péché dit « mortel » est celui par lequel nous nous séparons volontairement de Dieu ; il peut être qualifié ainsi soit sur base de la matérialité de l’acte, soit sur base de l’intentionnalité de l’acte. Dans le cas de la masturbation, la matière est considérée comme grave, mais ne suffit pas à déterminer le caractère « mortel » du péché. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique dit en effet au n° 2352 :
« Par la masturbation, il faut entendre l'excitation volontaire des organes génitaux, afin d'en retirer un plaisir vénérien. Dans la ligne d'une tradition constante, tant le magistère de l'Eglise que le sens moral des fidèles ont affirmé sans hésitation que la masturbation est un acte intrinsèquement et gravement désordonné. Quel qu'en soit le motif, l'usage délibéré de la faculté sexuelle en dehors des rapports conjugaux normaux en contredit la finalité. La jouissance sexuelle y est recherchée en dehors de "la relation sexuelle requise par l'ordre moral, celle qui réalise, dans le contexte d'un amour vrai, le sens intégral de la donation mutuelle et de la procréation humaine" (décl. "Persona humana" 9).
Pour former un jugement équitable sur la responsabilité morale des sujets et pour orienter l'action pastorale, on tiendra compte de l'immaturité affective, de la force des habitudes contractées, de l'état d'angoisse ou des autres facteurs psychiques ou sociaux. »
Le dernier paragraphe laisse la porte ouverte à une évaluation en fonction de la personne : l’acte est grave, mais qu’en est-il de l’intentionnalité de son auteur ? La personne agit-elle avec malice ou par faiblesse ? Sans se soucier du jugement divin ou emportée par une habitude qui la domine, par des peurs secrètes qui la poussent à agir, malgré un désir sincère de se convertir, de sortir de sa prison ?
De la réponse à ces questions découlera s’il s’agit d’un péché « véniel » (de faiblesse) ou d’un péché « mortel ».
Quoi qu’il en soit, je vous confie à Saint Joseph pour qu’il vous aide à retrouver votre pleine liberté ; et surtout : ne vous découragez pas et ne vous résignez pas : à celui qui persévère dans le combat, même s’il subit de lourdes défaites, le Seigneur donne la victoire finale !




en quelque sorte une idolâtrie, puisque je me coupe de la relation à Dieu pour me centrer sur moi-même.

Invité

Message par Invité »

Merci de ces précisions... j'ai moi-même bcp de mal à lutter contre la tentation de la masturbation depuis que j'ai 20 ans environ... et si j'ai cru m'en être débarassée, depuis qqs mois, je suis bien souvent à l'extrême limite de retomber ! Je n'éprouve plus exactement la même honte à m'en confesser, mais en lisant votre réponse, "Il y aurait donc à revisiter les relations fondatrices de votre personnalité (relation au père, la mère, la fratrie) pour essayer de découvrir où se situe le nœud qui vous empêche aujourd’hui encore, de vous épanouir pleinement dans votre vie relationnelle." Je n'avais jms pensé à prendre ce pb par ce bout là ! Pouvez-vous expliquer un peu plus ce que vous entendez ? Je vous demande cela, car je ne me connais ps de pb familiaux particuliers ???? et je me méfie tjs un peu des explications "psycho-spiritualisante" rapide dont on raffole aujourd'hui.
Je n'en ai encore jamais parlé à la soeur qui m'accompagne spirituellement depuis qqs mois (ben, simplement parce que ce n'était plus vraiment d'actualité)... ms vu les combats des dernières semaines et la lecture de votre message, je crois qu'il faudra bien y passer !
Je me confie donc aussi à votre prière (et à celle de St Joseph, que j'aime bcp !)

P. Joseph-Marie
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Enregistré le : 5 sept. 2003

Message par P. Joseph-Marie »

Je crains que ce soit difficile de donner des réponses claires sur un sujet aussi délicat, sans rencontrer la personne. Disons simplement que l’auto-érotisme est un échec relationnel, la recherche d’une jouissance solitaire au lieu d’une rencontre épanouissante avec l’autre. C’est pourquoi il est bon de vérifier si cet échec ne s’enracine pas dans quelque blessure de la petite enfance, qui aurait conduit à un certain narcissisme.
Il est vrai que la masturbation peut aussi s’enraciner dans une expérience négative qui n’a rien à voir avec les parents ou les proches, par exemple « l’initiation » maladroite par un copain à ce genre de pratique, qui devient ensuite compulsive et dont il est extrêmement difficile de se défaire.
En général une personne qui a vécu cette dépendance, même lorsqu’elle est parvenu à s’en défaire, demeure fragile, et doit veiller particulièrement à ne pas s’exposer à des tentations dans ce domaine. J’ajoute que les phases dépressives n’arrangent en général pas les choses ; tout comme les difficultés familiales ou professionnelles, les déceptions en tout genre, le désoeuvrement. Il faut veiller à un bon équilibre de vie, évitant les excès alimentaires et les boissons alcooliques, et si possible intégrant la pratique d’un sport qui permet de défouler les tensions internes qui autrement risquent de réveiller le problème. Enfin une vie de prière et sacramentelle régulière, et tout particulièrement la lectio divina (lecture savoureuse de l’Ecriture), sont des armes traditionnellement conseillés (et efficace !) dans ce beau combat spirituel pour la pureté.

Éric

Message par Éric »

Bonjours et paix à vous, père spirituel

Pouvez-vous m'expliquez la nuance dans la profondeur de la miséricorde que Dieu déploit à l'égard d'un catholique repentant par le sacrement de réconciliation et d'un protestant repentant dans sa chambre à coucher?

On m'a appris que le canal ordinaire que Dieu utilisait pour répandre sa miséricorde à l'état pur, de manière plénière était le sacrement de réconciliation ( Jésus donna le pouvoir à ses apôtres de pardonner en son nom les péchés...) et que le débordement de sa miséricorde se répandait dans le coeur des protestants qui demandent pardon par un canal "extra"ordinaire de la grâce et donc dilué un peu.

Cependant, le prêtre au nom de Jésus-Christ, dans le sacrement de réconciliation à le pouvoir de pardonner les péchés mais ils ne sont pas expiés pour autant. (ex. j'arrête de fumer la cigarette mais mes poumons sont encore encrassés). Alors, qu'en est-il réellement de cette différence d'intensité du pardon et de sa miséricorde à l'égard de ses enfants de confessions différentes?

Pouvez-vous aussi m'expliquez jusqu'à qu'elle point le boudhiste ou l'athé sera pardonné par Jésus-Christ s'il regrette amèrement ses fautes? Merci de me répondre et désolé de vous faire surchauffer les cellules de votre cerveau!

P. Joseph-Marie
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Enregistré le : 5 sept. 2003

Message par P. Joseph-Marie »

Ma réponse n’est pas une dérobade, malgré l’apparence ! Dieu est lié par ses sacrements : il s’est engagé de nous faire miséricorde si nous nous approchons de lui dans le mystère du sacrement de réconciliation. Mais cela ne signifie pas que le Seigneur ne se réserve pas d’autres chemins par où il peut venir au devant de ses enfants repentants ! Il en va ainsi pour le frère protestant qui confesse ses fautes dans le secret de son cœur ou à un « ancien » dont il attend la confirmation de son pardon, ainsi que pour un représentant d’une autre religion qui se laisse conduire par l’Esprit sur le chemin de la repentance. En tout cas, tout mouvement de conversion trouve sa source en Dieu, et tend à conduire à lui.
J’ajoute cependant que le sacrement de réconciliation est aussi un sacrement de guérison : non seulement le Seigneur me pardonne mes offenses, mais la grâce qu’il me donne est aussi « sanans », c'est-à-dire guérissante. Car le péché me blesse profondément et laisse des cicatrices ; de plus il s’enracine souvent dans des blessures antérieures qui me fragilisent dans le combat spirituel. Aussi le Seigneur nous fortifie-t-il par le sacrement de réconciliation d’une manière que je ne trouve pas dans les autres formes d’expression de mon repentir.
Enfin je précise que je ne suis « tenu » de confesser (en principe) que les péchés dits « mortels », c'est-à-dire ceux qui me coupent de la grâce sanctifiante ; pour ce qui est des péchés véniels, l’acte de contrition ou la célébration pénitentielle en début d’Eucharistie devraient suffire. Ce qui rejoint l’attitude du frère protestant. Si néanmoins il est chaudement conseillé de confesser les fautes vénielles, c’est précisément pour obtenir aussi cette grâce de guérison à laquelle je faisais allusion.
Quant l’expiation, la « pénitence » que me donne le prêtre suite à ma confession qui a pour but précisément de me permettre d’expier la faute pardonnée. Cela revient en fait à compenser par une charité surabondante, le manque d’amour en quoi consistait mon péché.

Verrouillé