Frère Dominique,
vous dites qu'on ne peut lire la Bible au premier degré.
La Bible est-elle ou n’est-elle pas la Parole de Dieu?
A quel degré Dieu écrit-il la Bible?
Selon ce que vous dites, la Bible ne relate jamais des événements historiques mais seulement une interpétation de ces événements.
Il est donc impossible d'accéder à la vérité. Il y a toujours entre l'événement et moi, la Bible, qui n'est plus l'authentique Parole de Dieu mais un texte écrit par des hommes qui nous proposent une interprétation d'événements qu'ils n'ont pas vu de leurs yeux.
Du coup, toute la Bible devient un livre suspect que nous ne pouvons plus lire comme vrai mais comme n’importe quel texte littéraire.
En est-il de même des Evangiles?
Sont-ils la relation “vraie et indiscutable” d'événements historiques ou sont-ils seulement une interprétation plus ou moins poétique
d’événements non vérifiés?
Tout à coup, du seul fait que vous affirmiez qu'il ne faut pas lire la Bible à la lettre de son récit, c'est tout l'Ancien et le Nouveau Testament qui deviennent des livres dont l’authenticité est invérifiée.
Avez-vous réellement comme projet de nous faire douter de la vérité de la Parole de Dieu?
Jacob le menteur et le peuple de Dieu
Re: Bible et vérité historique
Je n’ai pas pour projet de vous faire douter de la vérité de la Parole de Dieu, mais de vous montrer que la vérité de la Parole de Dieu ne sera pas découverte dans une lecture fondamentaliste.
Ce que j’essayais d’expliquer, c’est que la Bible est profondément ancrée dans l’histoire, car elle a été écrite par des hommes appartenant à une certaine culture et qui se sont exprimé au sein de cette culture. Imaginez qu’un auteur écrive aujourd’hui un roman contenant cette phrase : « Ce tableau était beau comme la Joconde ». Si ce roman est lu dans trente siècles, en l’an 5003, il faudra que les lecteurs de cette époque ait quelque part la trace de la Joconde pour pouvoir comprendre le compliment ! Pour la Bible, c’est pareil : nous sommes limités dans notre interprétation par ce que nous connaissons de la culture qui l’a engendrée. Et comme cette culture est lointaine et très différente de la nôtre, il y a de nombreuses difficultés pour la comprendre spontanément. C’est ce que je voulais dire par ne pas lire au premier degré.
Deuxième point : les textes de la Bible sont-ils « la relation “vraie et indiscutable” d'événements historiques ou sont-ils seulement une interprétation plus ou moins poétique d’événements non vérifiés ». La question est fondamentale, mais elle est mal formulée. Vous opposez l’histoire, c'est-à-dire raconter ce qui s’est passé, avec la fiction, c'est-à-dire un récit imaginé par l’auteur. La différence est plus subtile : l’histoire en effet n’est pas le récit de ce qui s’est passé, mais un discours qui prétend rendre compte de ce qui s’est passé. La nuance est de taille. Il ne s’agit pas d’opposer ce qui s’est vraiment passé avec ce qui a été inventé, mais de faire la différence entre prétendre dire ce qui s’est passé et montrer qu’on invente librement.
Or la Bible prétend clairement dire qui s’est passé ! Elle n’est donc pas un roman. La Bible est l’histoire lue avec les yeux de Dieu, l’histoire sainte. Et elle est inspirée, c'est-à-dire écrite par Dieu. Regardez, toujours dans le récit de la création, avec quelle simplicité nous avons accès aux pensées de Dieu, à ses paroles. Or il n’y avait personne pour enregistrer sur un magnétophone ! C’est un des aspects du caractère inspiré que de nous donner accès à ces éléments, qui seraient inconnus des hommes sinon. Mais de là à prétendre que Dieu à « dit » exactement ces mots, ce serait un non-sens. Dieu est esprit, il n’a pas de bouche pour « dire ». Sa Parole est le Verbe, leur dialogue est ineffable. Mais comme on doit bien écrire quelque chose, l’Esprit Saint qui préside à l’écriture de la Bible a permis qu’il soit écrit « que la lumière soit ». Ainsi nous avons accès au mystère de la création, en vérité. Mais Dieu n’a rien « dit », il n’est pas un homme, il est Dieu.
Ce qui est en jeu dans la Bible est donc réellement une expérience historique, vécue dans notre monde, et en même temps surnaturelle. La Bible adopte donc réellement une démarche d’écriture de l’histoire, mais à la façon dont on le faisait dans l’antiquité. Autre exemple frappant : si les philistins sont battus, il faut écrire qu’ils ont été massacrés jusqu’au dernier et que la race est anéantie. De nos jours nous crierions au mensonge, puisque la page d’après les philistins sont réapparus et attaquent de nouveau. Mais c’est une façon d’écrire l’histoire, qui n’est pas la nôtre aujourd’hui, mais qui est rigoureusement vraie, même si le nombre des victimes est exagéré.
Ne pas lire au premier degré c’est donc faire attention aux anachronismes : les gens qui ont écrit la Bible ne pensaient pas comme nous le faisons aujourd’hui. Ne projetons pas nos questions modernes dans un texte qui ne se les pose pas.
Donc : oui, la Bible est historique. Mais : écrire l’histoire n’a jamais consisté, ni alors ni aujourd’hui, à écrire fait pour fait. La Bible montre les enjeux des événements au sein de l’histoire du salut. Il ne faut pas relativiser ce qu’elle écrit, mais l’accueillir dans son contexte.
Ce que j’essayais d’expliquer, c’est que la Bible est profondément ancrée dans l’histoire, car elle a été écrite par des hommes appartenant à une certaine culture et qui se sont exprimé au sein de cette culture. Imaginez qu’un auteur écrive aujourd’hui un roman contenant cette phrase : « Ce tableau était beau comme la Joconde ». Si ce roman est lu dans trente siècles, en l’an 5003, il faudra que les lecteurs de cette époque ait quelque part la trace de la Joconde pour pouvoir comprendre le compliment ! Pour la Bible, c’est pareil : nous sommes limités dans notre interprétation par ce que nous connaissons de la culture qui l’a engendrée. Et comme cette culture est lointaine et très différente de la nôtre, il y a de nombreuses difficultés pour la comprendre spontanément. C’est ce que je voulais dire par ne pas lire au premier degré.
Deuxième point : les textes de la Bible sont-ils « la relation “vraie et indiscutable” d'événements historiques ou sont-ils seulement une interprétation plus ou moins poétique d’événements non vérifiés ». La question est fondamentale, mais elle est mal formulée. Vous opposez l’histoire, c'est-à-dire raconter ce qui s’est passé, avec la fiction, c'est-à-dire un récit imaginé par l’auteur. La différence est plus subtile : l’histoire en effet n’est pas le récit de ce qui s’est passé, mais un discours qui prétend rendre compte de ce qui s’est passé. La nuance est de taille. Il ne s’agit pas d’opposer ce qui s’est vraiment passé avec ce qui a été inventé, mais de faire la différence entre prétendre dire ce qui s’est passé et montrer qu’on invente librement.
Or la Bible prétend clairement dire qui s’est passé ! Elle n’est donc pas un roman. La Bible est l’histoire lue avec les yeux de Dieu, l’histoire sainte. Et elle est inspirée, c'est-à-dire écrite par Dieu. Regardez, toujours dans le récit de la création, avec quelle simplicité nous avons accès aux pensées de Dieu, à ses paroles. Or il n’y avait personne pour enregistrer sur un magnétophone ! C’est un des aspects du caractère inspiré que de nous donner accès à ces éléments, qui seraient inconnus des hommes sinon. Mais de là à prétendre que Dieu à « dit » exactement ces mots, ce serait un non-sens. Dieu est esprit, il n’a pas de bouche pour « dire ». Sa Parole est le Verbe, leur dialogue est ineffable. Mais comme on doit bien écrire quelque chose, l’Esprit Saint qui préside à l’écriture de la Bible a permis qu’il soit écrit « que la lumière soit ». Ainsi nous avons accès au mystère de la création, en vérité. Mais Dieu n’a rien « dit », il n’est pas un homme, il est Dieu.
Ce qui est en jeu dans la Bible est donc réellement une expérience historique, vécue dans notre monde, et en même temps surnaturelle. La Bible adopte donc réellement une démarche d’écriture de l’histoire, mais à la façon dont on le faisait dans l’antiquité. Autre exemple frappant : si les philistins sont battus, il faut écrire qu’ils ont été massacrés jusqu’au dernier et que la race est anéantie. De nos jours nous crierions au mensonge, puisque la page d’après les philistins sont réapparus et attaquent de nouveau. Mais c’est une façon d’écrire l’histoire, qui n’est pas la nôtre aujourd’hui, mais qui est rigoureusement vraie, même si le nombre des victimes est exagéré.
Ne pas lire au premier degré c’est donc faire attention aux anachronismes : les gens qui ont écrit la Bible ne pensaient pas comme nous le faisons aujourd’hui. Ne projetons pas nos questions modernes dans un texte qui ne se les pose pas.
Donc : oui, la Bible est historique. Mais : écrire l’histoire n’a jamais consisté, ni alors ni aujourd’hui, à écrire fait pour fait. La Bible montre les enjeux des événements au sein de l’histoire du salut. Il ne faut pas relativiser ce qu’elle écrit, mais l’accueillir dans son contexte.
Re: Jacob le menteur et le peuple de Dieu
Merci, frère Dominique pour vos explications qui m'aident à réfléchir et à comprendre.
Juste une remarque:
Vous dites et je vous cite:
“La Bible est écrite par Dieu.”
Ensuite, vous écrivez:
“Dieu n’a pas de bouche pour “dire”.
Dieu n’a rien “dit”, il n’est pas un homme, il est Dieu.
Si Dieu n’a pas de bouche comme vous le soulignez, il n’a pas non plus de mains pour tenir une plume, donc il n’écrit ni ne parle.
De quelle façon est-il Dieu?
xxxx
L’identification de la Bible, de la langue hébraïque et de Dieu telle est aussi l’étonnante révélation de la Bible.
C’est sur le mont Sinaï que Dieu donna sa Loi à Moïse écrite dans sa propre langue divine.
Souvenons-nous comment dans les textes prophétiques les prophètes accusent Israël d’avoir prostitué la langue que YHWH a généreusement donnée à son peuple.
xxxx
Vous dites que l’histoire n’est pas le récit de ce qui s’est passé mais un discours qui prétend rendre compte d'un événement passé.
L’histoire est un discours construit sur des documents qui doivent confirmer la vérité de la thèse proposée par l'historien pour expliquer l'événement. Sans documents et sans références, ce discours n’est qu’une fable. Il n'est pas nécessaire de souligner l'importance cruciale des archives souvent difficiles à consulter en raison du secret qui les entoure.
Juste une remarque:
Vous dites et je vous cite:
“La Bible est écrite par Dieu.”
Ensuite, vous écrivez:
“Dieu n’a pas de bouche pour “dire”.
Dieu n’a rien “dit”, il n’est pas un homme, il est Dieu.
Si Dieu n’a pas de bouche comme vous le soulignez, il n’a pas non plus de mains pour tenir une plume, donc il n’écrit ni ne parle.
De quelle façon est-il Dieu?
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L’identification de la Bible, de la langue hébraïque et de Dieu telle est aussi l’étonnante révélation de la Bible.
C’est sur le mont Sinaï que Dieu donna sa Loi à Moïse écrite dans sa propre langue divine.
Souvenons-nous comment dans les textes prophétiques les prophètes accusent Israël d’avoir prostitué la langue que YHWH a généreusement donnée à son peuple.
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Vous dites que l’histoire n’est pas le récit de ce qui s’est passé mais un discours qui prétend rendre compte d'un événement passé.
L’histoire est un discours construit sur des documents qui doivent confirmer la vérité de la thèse proposée par l'historien pour expliquer l'événement. Sans documents et sans références, ce discours n’est qu’une fable. Il n'est pas nécessaire de souligner l'importance cruciale des archives souvent difficiles à consulter en raison du secret qui les entoure.
Re: De quelle façon Dieu est-il Dieu ?
Merci des questions que vous posez. Mais pour qu'elles profitent facilement au plus grand nombre, merci aussi de ne poser qu'une question à la fois : cela rend l'utilisation du moteur de recherche plus aisée. Vous n'êtes pas limitée en nombre de messages 
1/ De quelle façon Dieu est-il Dieu ?
Si je vous répondais, je serais Dieu... Il n'y a rien à faire nous sommes des hommes, et Lui est l'Au-delà de tout, dont on ne peut rien dire en langage humain. Alors deux solutions : ou bien nous arrêtons de parler de lui (quel dommage), ou bien nous acceptons de prendre des moyens détournées comme des images. Et alors on dit de Dieu qu'il a des pieds pour courrir sur les montagnes, et une bouche pour cracher des éclairs. Accepter les anthropomorphismes n'est pas en être dupe.
Remarquez que Jésus n'a pas fait mieux. Pour parler du Royaume, il a systématiquement parlé en paraboles !
1/ De quelle façon Dieu est-il Dieu ?
Si je vous répondais, je serais Dieu... Il n'y a rien à faire nous sommes des hommes, et Lui est l'Au-delà de tout, dont on ne peut rien dire en langage humain. Alors deux solutions : ou bien nous arrêtons de parler de lui (quel dommage), ou bien nous acceptons de prendre des moyens détournées comme des images. Et alors on dit de Dieu qu'il a des pieds pour courrir sur les montagnes, et une bouche pour cracher des éclairs. Accepter les anthropomorphismes n'est pas en être dupe.
Remarquez que Jésus n'a pas fait mieux. Pour parler du Royaume, il a systématiquement parlé en paraboles !
Re: la langue de Dieu
la langue de Dieu est la langue des hommes à qui il s'adresse. Il était doué pour les langues bien avant la Pentecôte 
Prétendre qu'il existe une "langue de Dieu" est méconnaître à la fois Dieu et une langue. Une langue est faite pour communiquer. Or la communication au sein de la Trinité n'a pas besoin de mots, elle est pur don de soi, sans aucune médiation. C'est un autre ordre. Nous, nous avons besoin de moyens pour franchir la matière, parce que nous sommes incarnés. Sans les mots, nous ne discuterions pas...
Dieu n'en a pas besoin. Quand il nous parle il utilise les nôtres. Ou plutôt, quand nous voulons rendre compte d'une expérience mystique, nous utilisons nos mots et nos catégories intellectuelles. Ce n'est pas une limite, c'est lié à ce que nous sommes. Moïse comme tous les autres.
Prétendre qu'il existe une "langue de Dieu" est méconnaître à la fois Dieu et une langue. Une langue est faite pour communiquer. Or la communication au sein de la Trinité n'a pas besoin de mots, elle est pur don de soi, sans aucune médiation. C'est un autre ordre. Nous, nous avons besoin de moyens pour franchir la matière, parce que nous sommes incarnés. Sans les mots, nous ne discuterions pas...
Dieu n'en a pas besoin. Quand il nous parle il utilise les nôtres. Ou plutôt, quand nous voulons rendre compte d'une expérience mystique, nous utilisons nos mots et nos catégories intellectuelles. Ce n'est pas une limite, c'est lié à ce que nous sommes. Moïse comme tous les autres.
Re: Références extra-bibliques
C'est ce que j'essayais d'expliquer. La nécessité d'archives est une exigence de notre façon de concevoir l'histoire aujourd'hui. Elle est propre à nous. Dans l'antiquité il n'en était pas ainsi. Cela ne veut pas dire que cela ne se faisait pas : il y a de nombreuses références extra-textuelles dans la Bible (les noms de lieu, l'allusion à des noms de règnes ou de dynasties, etc), mais aux yeux de ceux qui l'ont écrite, ce n'est pas un critère de vérité comme cela en est un pour nous. Pour eux le critère de vérité est la mention d'éléments liés à l'omniscience, au fait qu'on peut raconter des choses que Dieu seul connaît. C'est pour eux ce qui faisait l'autorité du texte.
Il n'est pas rigoureux intellectuellement de projeter sur un texte des catégories qui sont les nôtres, mais qui ne sont pas les siennes.
Prenez l'exemple d'un western : le gentil, c'est pas celui qui refuserait de tuer des hommes. Ca ce sont nos catégories à nous. Le gentil d'un western c'est celui qui a un cheval blanc et qui tire plus vite que tout le monde. Personne ne critiquerait cela car nous connaissons les règles de cet exercice, si bien que nous laissons les enfants regarder un western sans souci. Mais imaginez, en 5003, si les archéologues n'avaient comme seule et unique trace de notre culture une cassette vidéo d'un western spagetti ! En appliquant votre raisonnement ils diraient : les hommes du XXe siècles étaient tous des rustres qui passaient leur temps à s'entretuer au mépris de tout respect élémentaire de la vie humaine. Leur erreur serait d'avoir méconnu les règles du western, et d'avoir appliqué les leurs...
D'où l'importance de connaître les coutumes de la littérature antique pour juger l'histoire.
Il n'est pas rigoureux intellectuellement de projeter sur un texte des catégories qui sont les nôtres, mais qui ne sont pas les siennes.
Prenez l'exemple d'un western : le gentil, c'est pas celui qui refuserait de tuer des hommes. Ca ce sont nos catégories à nous. Le gentil d'un western c'est celui qui a un cheval blanc et qui tire plus vite que tout le monde. Personne ne critiquerait cela car nous connaissons les règles de cet exercice, si bien que nous laissons les enfants regarder un western sans souci. Mais imaginez, en 5003, si les archéologues n'avaient comme seule et unique trace de notre culture une cassette vidéo d'un western spagetti ! En appliquant votre raisonnement ils diraient : les hommes du XXe siècles étaient tous des rustres qui passaient leur temps à s'entretuer au mépris de tout respect élémentaire de la vie humaine. Leur erreur serait d'avoir méconnu les règles du western, et d'avoir appliqué les leurs...
D'où l'importance de connaître les coutumes de la littérature antique pour juger l'histoire.