liberté et soumission

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jacques riel belgique

liberté et soumission

Message par jacques riel belgique »

Mon Père, permettez-moi ces questions:
Dans un de vos livres destinés aux parents vous leur rappelez que c'est Dieu et lui seul qui donne la vie et que les parents sont « les instruments de sa création ».
Dans le même livre, vous rappelez aux couples que l'amour trouve son épanouissement dans la fécondité et que l'acte charnel vécu égoïstement en refusant la fécondité est un péché.
Parents, nous ne sommes pas grand chose, juste des instruments. Amants, nous devons refuser l'amour spontané et vivifiant. Quant à Jésus, il est réduit à l'état misérable d'objet.
Si, de plus, je n'oublie pas que la mort nous amputera brutalement de notre corps, je ne vois pas bien où est l'amour, à moins que, par amour de Dieu, nous aspirions à devenir à notre tour, des objets dans la main de Dieu, sans autre liberté que d'accepter joyeusement notre soumission.
Une doctrine aussi sévère et réductrice agit à l'envers de nos désirs de liberté, de responsabilité et d'amour.
Demander à la victime d'aimer son bourreau, à l'esclave d'aimer son maître, à celui qui est exploité d'aimer son exploiteur, comme le voulait Pie IX, sous prétexte que le maître détient son autorité de Dieu Lui-même, est une doctrine perverse car elle encourage l'exploiteur, le maître, le bourreau.
Les gouvernements totalitaires nous privent de nos libertés et nous souffrons de cette privation. Si nous désobéissons aux ordres nous pouvons être emprisonnés, fusillés.
Les citoyens n'ont plus la liberté de choisir leurs représentants.
Pour le pouvoir, ils sont effectivement des objets. Quelle différence avec ce que vous prônez ?
Le chrétien doit-il aimer sa condition de soumis pour imiter Jésus sur la croix ? Le citoyen d'un état totalitaire n'a-t-il pas le devoir de se révolter contre le pouvoir qui l'asservit ?
La servitude vécue, sans se rebeller, avec amour et reconnaissance pour le tyran, est-elle l'état idéal du chrétien tel que vous le concevez ?
La crucifixion de Jésus sur sa croix du Golgotha est-elle la seule condition idéale pour un Dieu ?
Ne pourrions-nous aimer Jésus si nous le voyions pas cloué sur sa croix, mais agissant avec fermeté contre ses ennemis, comme le faisait son Père dans l'Ancien Testament ?

P. Joseph-Marie
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Message par P. Joseph-Marie »

Je suis désolé, mais il y a trop d’éléments disparates qui s’enchevêtrent dans votre intervention, et que vous semblez mettre sur un même niveau - de l’acte charnel à la relation maître esclave - que vraiment je ne vois pas comment aborder une réponse !
Je dirai simplement que le soir du jeudi saint, le Seigneur Jésus a effectivement choisi librement d’être celui dont on pourrait disposer. Dans l’institution de l’Eucharistie, il donne lui-même cette interprétation de sa Passion tout en nous rappelant que son chemin est pour nous un exemple. Je sais bien que cela semble tout à fait au-dessus de nos forces, mais en lisant la vie des saints, il semble bien qu’avec l’aide de l’Esprit Saint, ils aient été capables de suivre leur Maître sur cette voie de la vie livrée par amour…

Invité

Re: liberté et soumission

Message par Invité »

jacques riel belgique a écrit :Demander à la victime d'aimer son bourreau, à l'esclave d'aimer son maître, à celui qui est exploité d'aimer son exploiteur, comme le voulait Pie IX, sous prétexte que le maître détient son autorité de Dieu Lui-même, est une doctrine perverse car elle encourage l'exploiteur, le maître, le bourreau.
Bonsoir à tous,
je voudrais intervenir sur cette question (cf"aimer son bourreau"), ce qui pourrait aussi vous permettre, Père Joseph-Marie, d'avoir des questions plus ciblées :wink:
L'Eglise, et même l'ensemble des philosophies humaines il me semble, demande à chaque homme d'honorer ses parents, de les chérir, bref de les aimer. Quand nous avons eu la chance de naître dans un foyer aimant et doux, cela peut nous sembler une évidence. Mais que penser, par exemple, de la situation des enfants d'Emile Louis (personne condamnée par la justice française pour des actes odieux sur mineurs et personnes handicapées)?
Il me semble que l'Eglise ne demande pas (et a fortiori n'exige pas) à ces enfants d'ignorer leurs souffrances, d'ignorer le passé et les horreurs qu'ils ont pu vivre. Même si c'est une situation très délicate et très pénible, elle les encourage au pardon, et aussi difficile que cela puisse paraître, à aimer ces parents si peu aimables.
Je voudrais enfin mentionner un épisode de la vie de Sainte Maria Goretti: avant de mourir, son confesseur lui conseilla de pardonner au garçon qui essaya de la violer et qui réussit à la blesser mortellement. Comment, en effet, trouver sa place auprès du Seigneur (source de miséricorde) alors que son coeur est entâché de rancune, voire de haine, même a priori légitime?
Il ne s'agit jamais d'approuver l'exploitation, ou la torture. Mais il s'agit, ce qui peut être très difficile et très courageux, de savoir pardonner, et donc d'aimer la personne qui exploite ou qui torture. Enfin, j'espère avoir réussi à expliciter ma pensée comme il faut, et su me faire comprendre. Ces circonstances d'exploitation étant toujours, je le répète, très douloureuses pour les victimes.

P. Joseph-Marie
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Message par P. Joseph-Marie »

Je ne crois pas qu’on puisse aborder des sujets aussi délicats en quelques lignes. Car pour pardonner, il faut non seulement mobiliser la foi, l’espérance et la charité (vertus théologales et donc infuses), mais aussi l’intelligence et bien sûr la volonté - mais cette dernière n’est efficace que si l’intelligence elle-même avance dans la compréhension.
Or pour aider l’intelligence, il me semble que Saint Thomas, dans son traité des passions de l’âme, nous donne des clés précieuses. Ainsi il nous y apprend que la haine est toujours subordonnée à l’amour et ne peut être plus intense que lui. Dès lors, il s’agit de faire la différence entre la personne – qui est toujours digne d’être aimée – et son agissement, qui peut être haïssable. Je n’aime pas la violence de mon bourreau : je la hais franchement, et il est impossible de faire autrement car cette haine est spontanée. Par contre je porte tout mon effort à libérer l’amour pour ce fils de Dieu en puissance qui se cache derrière ce tortionnaire.
Je suis bien conscient de « parler comme un livre », mais en même temps je peux vous assurer que cette distinction aide énormément à mettre de l’ordre dans nos passions et à collaborer ainsi avec la grâce de l’Esprit Saint pour que triomphe la miséricorde.

invitée

pardon

Message par invitée »

Cher Père Joseph-Marie,
Au sujet du pardon, vous parlez de volonté. Il me semble pourtant que la volonté n'a aucune place dans le pardon accordé à son bourreau. Le pardon ne vient pas de nous, et de nous même nous sommes incapables par acte de volonté de "libérer" le pardon. Le pardon ne peut venir que de Dieu, c'est une grâce qu'il nous fait et un cadeau merveilleux car l'être qui n'a pas pardonné est un être souffrant. A la volonté, je préfère le terme de liberté. La liberté des enfants de Dieu, de Le laisser oeuvrer en nos coeurs, pour qu'à la place de la haine et de la rancune, Il y mette la miséricorde et l'amour du prochain.
Pas facile en vérité de se laisser faire par Lui. C'est pourtant, le chemin simple et droit qu'Il nous propose.
udp

P. Joseph-Marie
Messages : 1327
Enregistré le : 5 sept. 2003

Message par P. Joseph-Marie »

Je ne crois pas que nos positions divergent. Mais votre acte de liberté, s’il doit être un acte humain, doit impliquer vos autres facultés. En particulier votre intelligence, qui vous montre, à la lumière de la Révélation, la beauté du pardon ; et votre volonté qui consent à accueillir la force de l’Esprit pour pardonner.
Peut-être votre réaction vient-elle d’une conception un peu trop restrictive de la volonté, confondue avec la faculté de l’action volontariste : même pour consentir à l’action de Dieu, il vous faut poser un acte de volonté, fût-ce celui de renoncer à agir par vous-même. S’ajoutent à cela le renoncement à la haine, et l’accueil de l’amour : que d’actes de volonté en perspective !

invitée

Message par invitée »

Sans Lui, je ne suis rien, Père Joseph-Marie, j'en ai fait la douloureuse expérience à maintes reprises.
Le choix que je pose en mettant mes pas dans les siens, est un acte de volonté et de liberté, je veux dire par là une réponse, librement consentie, à son appel.
Mais bon sang, de moi-même je suis parfaitement incapable de pardonner. C'est bien le Seigneur qui transforme mon coeur, et m'appelle à prendre de la hauteur.

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