Saints

CAP Corinne
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Enregistré le : mer. 29 oct. 2003 19:10

Message par CAP Corinne »

Bonjour mon Père,
J'aimerais poser une question plus terre à terre :wink: concernant le rapport des saints avec leur corps physique.
J'ai l'impression que, bien souvent, le corps physique, si on considère la vie des saints ( je n'en connais pas des masses, mais pour le peu que j'en sache..) est méprisé ou même brimé, ignoré ou poussé à la dernière extrêmité.
Cela va vraiment à l'encontre du courrant actuel qui prône un maximum de bien-être et la nécessité d'être bien dans sa peau au sens littéral du terme ( un esprit saint dans un corps saint; je ne sais pas le dire en latin :wink: ).
Comment se situer comme chrétien, entre ces deux extrêmes. Dans un juste milieu ?, mais le Christ ne semble pas aimer trop cette réponse du juste milieu :? ...
D'un autre côté, le corps physique est tout de même une création de Dieu et si on considère sa complexité et les merveilles de son foncitonnement, même si il est entaché par le péché , il est tout de même un vecteur de communication nécessaire à notre vie sur cette terre et je pense que c'est bien d'en prendre soin. Qu'en pensez vous ?

P. Joseph-Marie
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Enregistré le : lun. 29 sept. 2003 13:16

Message par P. Joseph-Marie »

Il ne saurait y avoir aucun mépris du corps dans une religion qui proclame sa foi en l’incarnation du Verbe dans notre chair !
Ceci dit, nous ne pouvons pas non plus oublier le péché (comme le fait allègrement notre « monde »). Nos problèmes ne viennent pas de notre corps, mais de l’anarchie entre le corps et l’âme spirituelle, instaurée par le péché. Nous sommes hélas devenu incapable de maîtriser les passions de l’âme (l’affectivité sensible – sentiments et émotions - que Saint Thomas subdivise en passions « concupiscibles » et « irascibles »). Selon le plan de Dieu, c'est-à-dire à l’origine, avant le péché, le corps et ses dynamismes (ses passions) étaient soumis à l’âme rationnelle, comme celle-ci l’était à l’Esprit. Après le péché, l’âme privée de la Lumière incréée de la grâce, s’est tournée vers la lumière créée des sens et s’est laissé fasciner par la beauté de la création, qu’elle a confondue avec le Créateur au point de l’idolâtrer.
Jésus nous a libéré de cet asservissement, et nous a ouvert le chemin vers la vie filiale. Il a restauré en nous l’image divine, et nous a communiqué l’Esprit Saint pour qu’il soit à nouveau notre guide intérieur et nous accorde la maîtrise sur nos passions (dans la lettre aux Galates, Saint Paul présente la maîtrise de soi comme un fruit de l’Esprit : Ga 5). Mais cette conversion, c'est-à-dire ce retournement de la fascination pour ce monde à l’émerveillement de la grâce, ne se fait pas sans combat, car nous demeurons attachés à ce qui nous entoure et nous sollicite par nos sens, nous invitant sans cesse d’une jouissance à l’autre. C’est pourquoi la vie spirituelle est un combat qui passe par une certaine prise de distance par rapport à ce que nous éprouvons comme nos « besoins » et qui n’est souvent qu’une réponse aux exigences de nos pulsions. Un des sens de l’ascèse du carême est précisément de nous donner progressivement cette liberté par rapport aux sollicitations de la chair – pris au sens large : tout ce qui nous rattache à ce monde : « N'aimez ni le monde ni ce qui est dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui. Car tout ce qui est dans le monde - la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la richesse - vient non pas du Père, mais du monde. Or le monde passe avec ses convoitises ; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement » (1 Jn 2, 15-17).
Les saints sont entrés résolument dans ce beau combat de la liberté avec l’aide de la grâce et sous la conduite de la Parole. Voilà pourquoi leur attitude par rapport à leur corps peut paraître quelque peu dure à certaines étapes de leur parcours. Mais ils ont aussi parfois une surprenante liberté, du moins une fois qu’ils ont passé l’étape de la dépendance et recouvré la vraie liberté des enfants de Dieu. Nous les voyons alors louer Dieu par tout leur être, y compris leur corps, car désormais celui-ci est arraché à « la triple concupiscence » dont parlait Saint Jean, et est parfaitement soumis à la grâce divine.

jean-marc

saintete

Message par jean-marc »

Mon Père,
Que voulait dire St thérèse lorsqu'elle écrit que "l'on pourra expliquer scientifiquement la sainteté". Est-elle sérieuse ou s'agit il d'une analogie ?

P. Joseph-Marie
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Enregistré le : lun. 29 sept. 2003 13:16

Message par P. Joseph-Marie »

Si la sainteté consiste dans la participation à la vie de l’Esprit Saint, je ne vois pas du tout comment la science pourrait se prononcer sur ce sujet ? La grâce est d’un autre ordre que la nature. Sans quoi il n’y aurait plus de distinction foi/raison : la raison suffirait pour tout expliquer. C’est ce dont a voulu nous convaincre le rationalisme, qui survit – sous une forme altérée certes – dans la postmodernité contemporaine.
Mais si nous confondons la nature et la grâce, s’en est fini du christianisme !

Nathalie

Message par Nathalie »

Merci pour cet admirable éclairage.

Mais voici qu’une autre question m’interroge. Dans les hagiographies, nous pouvons lire que Saint Dominique apparaît à Catherine de Sienne enfant, ou encore Sainte Claire à Thérèse d’Avila, Sainte Thérèse de Lisieux au petit Marcel Van, Saint Paul et tant d’autres à Adrienne Von Spear…
Les saints du Ciel ne disposant pas encore de leur corps de gloire, comment pouvons nous expliquer qu’ils puissent se donner à voir à certains frères ou sœurs ici bas? Est-ce en vertu de leur participation à la gloire du Christ, et de leur union mystique avec Lui ? Pouvons-nous penser que Le Christ les envoie en mission par son propre corps glorieux, en leur donnant dans cet instant l’apparence corporelle qu’ils ont eue sur terre ?

P. Joseph-Marie
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Enregistré le : lun. 29 sept. 2003 13:16

Message par P. Joseph-Marie »

Nous ouvrons le chapitre « théologie mystique ». Sainte Thérèse d’Avila distingue entre différentes formes de visions. Il y a les visions imaginatives, au cours desquelles la personne apparaît sous forme imagée, et les visions intellectuelles, qui sont d’un tout autre ordre, puisque les sens ne sont pas impliqués, pas même par le biais de l’imagination. Sainte Thérèse se souvenait de la couleur des yeux de Jésus lorsqu’elle avait eu une vision imaginative, mais était incapable de le décrire après une vision intellectuelle.
Ainsi donc il semble que dans la majorité des cas, la vision ne donne pas accès au corps glorieux. Ce serait plutôt le Seigneur qui imprime une image dans l’imagination du mystique, ou qui suscite une forme pensée dans l’intellect de la personne.

Verrouillé